
Giro 2025 : l’incroyable logistique de l’assistance neutre Shimano
Découvrez l’intérieur de l’assistance neutre Shimano lors du Giro 2025, une logistique de pointe essentielle au cyclisme professionnel en France.
Sous le soleil éclatant du Val d’Aoste, l’atmosphère est à la tension. À Verrès, au départ de la 20e étape du Giro 2025, les coureurs s’échauffent dans une effervescence de spectateurs. Mais dans l’ombre, un autre spectacle se prépare : celui des voitures d’assistance neutre Shimano, ces véhicules bleus devenus indispensables dans les plus grandes courses du monde. Aujourd’hui, nous avons la chance d’être à bord de l’une d’elles pour découvrir l’envers du décor, cette logistique d’une précision extrême qui constitue le cœur invisible de la compétition.
Une organisation d’une précision presque militaire
Le service d’assistance neutre de Shimano ne se limite pas à une simple présence sur le bord de la route ou à la distribution de bidons. C’est une structure européenne composée de 50 conducteurs, autant de mécaniciens, 5 coordinateurs et un manager, déployée sur plus de 450 jours de course chaque année, couvrant plus de 240 événements dans diverses disciplines cyclistes professionnelles. « Nous sommes l’équipe la plus présente dans le WorldTour, bien plus que n’importe quelle équipe », confie Massimo Subbrero, ancien directeur sportif devenu aujourd’hui au volant de la voiture que nous empruntons.
Lors de cette étape entre Verrès et Sestrières, trois voitures d’assistance neutre, une moto et un fourgon logistique en amont assurent une couverture optimale. Les véhicules sont positionnés selon un plan précis, afin de couvrir le peloton principal, les échappés et ceux qui restent en arrière. « Nous sommes la seule équipe qui ne court pas, mais qui est là pour tout le monde », précise notre chauffeur italien.
Un atelier roulant à toute vitesse
Notre véhicule, une Toyota RAV4 hybride, est une véritable boutique mobile dédiée au vélo. Diego, le mécanicien de garde, nous fait faire le tour de l’équipement : « Nous disposons de 14 roues, 6 vélos complets sur le toit, une dizaine de dérailleurs, plusieurs cassettes, des pédales de tous types (SPD-SL, Look, Time, Speedplay), ainsi que des outils spécialisés. Nous avons aussi de quoi distribuer de l’eau ou des gels si besoin. »
Les vélos sur le toit sont équipés de tiges de selle télescopiques, une innovation essentielle pour s’adapter à toutes les morphologies en cas d’urgence. « Nous avons même pré-réglé les hauteurs de selle des premiers du classement général », explique Diego. « Si un leader crève et que sa voiture d’équipe est trop loin, nous pouvons lui fournir un vélo prêt en seulement 20 secondes. »
Chaque jour, les mécaniciens analysent les modèles et les configurations utilisés par les différentes équipes, en repérant notamment les variantes de transmission (11 ou 12 vitesses, freins à disque 140 ou 160 mm, etc.). Leur objectif : pouvoir changer une roue en moins de 30 secondes, parfois même en courant à côté d’un coureur en pleine course. La rapidité et la précision sont primordiales.
Une course dans la course
En suivant la course, on découvre une réalité fascinante : être dans une voiture d’assistance, c’est vivre une compétition parallèle, où chaque mouvement est millimétré. Le pilote doit naviguer avec une précision chirurgicale entre motos de télévision, voitures des directeurs sportifs, motos de commissaires, et… les coureurs eux-mêmes. Lors des descentes à toute vitesse, où l’on peut atteindre 100 km/h sur des routes de montagne étroites, la maîtrise du véhicule devient un art.
Les échanges radio sont constants : crevaison d’un coureur, chute, avance du groupe de tête, tout est relayé en temps réel. Une communication interne via Shimano permet aussi de coordonner les véhicules. Le conducteur ajuste sa position, prêt à intervenir en une fraction de seconde, tout en respectant un tempo précis : « Il faut toujours garder une distance de sécurité tout en étant prêt à agir rapidement », explique notre pilote.
En cas de crevaison, le mécanicien bondit du véhicule en marche, roue à la main, pendant que la voiture se gare pour ne pas gêner la course. C’est une chorégraphie millimétrée, invisible pour la plupart, mais essentielle pour préserver l’intégrité de la course, même lors d’épisodes difficiles comme l’ascension du Col du Finestre, à près de 2 200 mètres d’altitude, encore enneigé à cette période.
Une logistique de haute technologie
Les véhicules sont préparés la veille dans des bases mobiles. Shimano possède des hubs en Espagne, au Benelux, en Italie, au Portugal et en Turquie. Le parc actuel comprend 29 voitures, une dizaine de motos et de fourgons, tous entretenus selon un protocole strict. « Nous utilisons à la fois des véhicules thermiques et hybrides », précise-t-on. « Les électriques ne sont pas encore assez autonomes pour couvrir une étape de 300 km avec une conduite sportive », contrairement aux véhicules électriques de la caravane du Tour de France, presque entièrement électriques mais à vitesse modérée.
Une voiture peut parcourir jusqu’à 15 000 km en conditions de course chaque année. Les composants embarqués — roues carbone, transmissions électroniques Di2, capteurs de puissance, pédaliers — ont une valeur de plusieurs dizaines de milliers d’euros. Tous les vélos, principalement de la marque Bianchi, sont conçus pour résister aux conditions extrêmes, qu’il s’agisse des pavés de Paris-Roubaix ou des ascensions alpines.
Une technicité hors norme et une impossibilité de standardisation
Ce qui frappe en observant l’équipement, c’est la diversité des composants : Shimano, SRAM, Campagnolo, freins à disque, 11 ou 12 vitesses, mono ou double plateau, axes traversants ou QR, pédales de toutes marques. La standardisation est impossible, chaque vélo étant une pièce unique.
Les avancées technologiques, telles que les transmissions sans fil, les batteries embarquées, les tiges de selle électroniques ou les capteurs de pression dans les pneus, complexifient encore davantage cette logistique. « On ne peut pas simplement changer une roue et espérer que tout fonctionne », insiste le mécanicien. « Il faut que la transmission soit opérationnelle, que le freinage soit parfait, et que le coureur ait confiance en son matériel. »
Une équipe dévouée, au service de la course
Au-delà des coureurs, ce sont des passionnés, anciens coureurs ou mécaniciens de haut niveau, qui composent cette équipe. Shimano privilégie aussi la diversité, avec une proportion croissante de femmes dans le peloton technique. La cohésion est palpable, chaque membre connaissant parfaitement son rôle. « Parfois, on peut sauver une course sans que personne ne s’en rende compte », confie le conducteur. « C’est notre plus grande fierté. »
Une logistique qui ne s’arrête jamais
Après chaque étape, à Sestrières, la voiture s’arrête dans une aire technique pour inspecter, recharger, et préparer la suivante. Les roues sont vérifiées, les vélos reconditionnés, les batteries rechargées, et les bouteilles d’eau vidées. Le ballet reprend le lendemain, avec la même rigueur. Pour Shimano, le Giro n’est qu’un exemple parmi d’autres : le Tour de France, la Vuelta, les Mondiaux ou les Jeux Olympiques, la routine des voitures bleues continue, discrète mais vitale.
Assister à une étape du Giro dans une voiture d’assistance, c’est pénétrer dans un univers où la préparation, la précision et la réactivité sont maîtres mots. Un monde où chaque seconde compte, où la mission est simple mais cruciale : permettre à la course de continuer, quoi qu’il arrive. Le service neutre Shimano incarne à la fois l’équité, la haute technicité et l’art de la logistique dans le cyclisme professionnel.