
Football : Vers une prise en charge des soins pour ex-joueurs atteints de démence
Proposition au Parlement pour que les instances du football financent les soins des anciens joueurs souffrant de démence liée au sport.
Une nouvelle proposition parlementaire pourrait contraindre les instances du football à contribuer financièrement aux soins des anciens joueurs atteints de maladies cérébrales, notamment celles causées par les coups de tête répétés au ballon. Cette initiative vise à reconnaître ces troubles comme des « maladies professionnelles » et à instaurer un dispositif de prise en charge des soins et du soutien pour les victimes.
Une réforme vers une reconnaissance des lésions cérébrales liées au football
Des amendements au Football Governance Bill sont en cours de rédaction afin de qualifier la question des troubles neurologiques causés par la pratique du football comme un enjeu de santé lié aux conditions professionnelles. L’objectif est d’obliger des acteurs majeurs, tels que la Football Association (FA) et la Professional Footballers’ Association (PFA), à financer la prise en charge médicale des joueurs concernés, estimant que les dispositifs actuels sont insuffisants.
En 2023, la PFA, avec le soutien de la Premier League, avait lancé un Brain Health Fund doté d’un million d’euros. Ce fonds a aidé 121 familles pour des adaptations à domicile ou la prise en charge en maison de retraite, mais il est vivement critiqué par les défenseurs des droits des ex-joueurs.
Des témoignages poignants et une mobilisation politique
Chris Evans, député du parti travailliste, fait partie des voix demandant un engagement plus ferme des instances du football pour couvrir les frais élevés de soins des anciens joueurs développant Alzheimer, démence ou autres maladies neurologiques après leur carrière.
Des figures emblématiques du football anglais, issues notamment de l’équipe victorieuse de la Coupe du Monde 1966 — comme Jack et Bobby Charlton, Martin Peters, Ray Wilson ou Nobby Stiles — ont succombé à la démence, ce qui alimente la mobilisation actuelle.
En janvier, l’ex-attaquant de Hull City Dean Windass a révélé souffrir de démence. Ce genre de reconnaissance publique met en lumière l’urgence d’un soutien institutionnel.
Un projet de loi pour responsabiliser les acteurs du football
Le Football Governance Bill prévoit la création d’un régulateur indépendant pour les cinq premières divisions du football masculin en Angleterre, afin d’assurer une gestion durable et responsable des clubs envers leurs supporters. Chris Evans milite pour y inclure un amendement destiné à établir un dispositif financier couvrant les besoins en soins des anciens footballeurs atteints de troubles neurologiques.
Lors d’une récente réunion parlementaire, des légendes du football comme Sir Geoff Hurst, le triple buteur en finale de Coupe du Monde, et Kevin Keegan, ancien entraîneur de l’Angleterre, ont témoigné ainsi que les vainqueurs de Premier League Chris Sutton et David May.
Andy Burnham, maire de la Grande Manchester, et Steve Rotheram, maire de Liverpool, ont contribué à la rédaction de cet amendement. Burnham a déclaré : « Le football semble nier la réalité de ces problèmes, mais cela ne peut plus durer ». Il a comparé cette situation à celle des mineurs du charbon, pour lesquels un régime d’indemnisation des maladies professionnelles avait été mis en place.
Une demande de reconnaissance des maladies comme des blessures professionnelles
Chris Evans souligne que les affections telles que la démence doivent être traitées comme des maladies liées au travail, avec une compensation et des assurances adaptées. Il insiste sur le fait que les joueurs qui ont exposé leur santé en pratiquant le football méritent un soutien financier pérenne.
L’amendement envisagé prévoit la mise en place « d’un schéma financier industriel » sous supervision pour aider les joueurs concernés. Il insiste également sur la nécessité que cette charge soit supportée par le secteur du football et non par le contribuable, en finançant ce dispositif notamment par les revenus des droits audiovisuels des compétitions.
Le député ajoute : « Je suis inquiet en regardant des matchs aujourd’hui, et particulièrement quand je vois mon fils de huit ans jouer et donner des coups de tête au ballon. Il est urgent de mener des recherches approfondies. Ce peut être un avantage pour la société si le football finance la recherche pour mieux comprendre et combattre la démence. »
Des études scientifiques confortent les inquiétudes
La FIELD Study de 2019, cofinancée par la PFA et la FA, a montré que les footballeurs ont un risque multiplié par trois fois et demi de décès par maladie neurodégénérative comparé à la population générale de même âge. Un rapport publié en décembre 2024 a confirmé que ce risque accru ne s’expliquait pas par des facteurs liés au mode de vie ou à la santé globale.
John Stiles, fils de Nobby Stiles décédé en 2020, a présidé l’événement au Parlement. Il s’est insurgé contre l’indifférence financière de l’industrie du football : « Comment expliquer que des héros en vie comme Tony Parkes ou tant d’autres ne bénéficient pas des soins qu’ils méritent d’un secteur qui génère pourtant d’énormes revenus ? »
Chris Sutton, dont le père Mike est également décédé de la démence, soutient la cause en déclarant : « Nous demandons à notre industrie de prendre soin de ses joueurs oubliés et de leurs familles qui doivent faire face à des coûts de soins considérables. Est-ce trop demander ? »
Réactions des instances du football
La PFA et la Premier League n’ont pas souhaité faire de commentaires à ce sujet. De son côté, un porte-parole de la FA a affirmé se consacrer à améliorer la sécurité dans le football, notamment par le financement de recherches indépendantes et la collaboration avec les instances internationales.
Un représentant de l’English Football League (EFL) a indiqué que l’association travaille avec les autres organismes pour garantir la sécurité des joueurs, tant au niveau professionnel que dans les catégories de base, à travers des programmes d’éducation, des recherches et des mesures sur le terrain telles que l’utilisation de remplacements pour commotions.
L’EFL assure également être engagée pour que les personnes affectées reçoivent le soutien nécessaire.