Pourquoi le rugby est-il presque uniquement pratiqué dans le Sud-Ouest ?

Bordeaux comme point de départ

Les premiers adeptes du rugby en France sont des Anglais. Au début du XIXᵉ siècle, le « football rugby » est développé pour canaliser l’énergie des jeunes aristocrates. Avec l’essor du commerce entre la France et le Royaume-Uni dans les années 1870, le rugby commence à s’implanter dans les villes portuaires françaises telles que Le Havre, La Rochelle, Bordeaux et Toulon. Joris Vincent, historien du rugby, précise que « par le commerce du vin, via la Gironde et le canal du Midi, le rugby se diffuse progressivement dans tout le Sud-Ouest ».

Autour de Bordeaux, le rugby s’affirme d’abord discrètement, mais s’épanouit avec grande ferveur. Le Stade bordelais remporte en 1899 son premier titre de champion de France, marquant un tournant pour le rugby dans le Sud-Ouest, qui se propage ensuite dans les villages et bourgs de la région.

Un sport républicain et laïque

À la fin du XIXᵉ siècle, le rugby s’intègre davantage dans les écoles publiques laïques du Sud-Ouest sous la IIIᵉ République. Pendant que l’éducation catholique domine dans d’autres régions, le rugby trouve un terreau fertile ici. Joris Vincent souligne que « l’Église, pour contrebalancer cette perte d’influence, encourage le développement du football dans les patronages catholiques ».

Ce contraste géographique entre le Sud-Ouest républicain et une Bretagne catholique, bien que primordiale, n’explique pas à elle seule la prévalence du rugby dans la région. Les instances dirigeantes du rugby, notamment la Fédération française de rugby (FFR), ont également joué un rôle- en concentrant les infrastructures et les investissements dans le Sud-Ouest.

Aux origines, un sport réservé à l’élite

Initialement, le rugby en France est un sport d’élite, privilégié par l’aristocratie et la grande bourgeoisie. Joris Vincent précise que « ce sport sert d’outil d’éducation pour l’élite française, en s’inspirant du modèle anglo-saxon ». Il se développe particulièrement dans l’enseignement secondaire, tandis que « l’école du peuple », tournée vers la gymnastique, privilégie une éducation physique moins axée sur le rugby.

Le rugby trouve également sa place dans les casernes, où les officiers initient leurs hommes à ce sport. La Première Guerre mondiale marque une inflexion dans la démocratisation du rugby, obligeant les fédérations à ouvrir le sport à un public plus large. Tout au long du XXᵉ siècle, le rugby gagne en popularité et devient plus accessible.

Un avenir élargi

Depuis les années 1990, le rugby commence à s’étendre en dehors du Sud-Ouest. Les fédérations prennent conscience des enjeux économiques et expandent le rugby dans de nouveaux territoires. Des villes telles que Nevers, Rouen et Vannes montrent tout l’intérêt d’implanter ce sport dans des zones autrefois considérées comme des déserts rugbystiques.