

Michel Pichaud : Une passion pour la marche et l’endurance
C’est en 1978, période où son dos le fait souffrir, que le Cussétois Michel Pichaud suit l’avis de son médecin et se met à marcher. Ses balades débutent dans la Montagne bourbonnaise et autour de Vichy, seul ou en famille, et tournent rapidement à une pratique régulière et fédératrice.
Ce qui a commencé comme une quête personnelle devient une dévorante passion. En quelques années, il parcourt plus de 40 000 kilomètres à pied, soit l’équivalent d’un tour de la planète à travers la France. Cette énergie, Michel la consacre à des sorties qui le mènent aux quatre coins du pays, toujours avec le sourire et une détermination intacte.
Son engagement naît au sein du club local ASG Rando (Association sportive des Graves), qui organise notamment la célèbre randonnée des feuilles mortes, le premier dimanche d’octobre. C’est là qu’il prend sa première licence et découvre le monde des longues marches et des défis collectifs, marquant le début d’une grande aventure.
À la section randonnée vient s’ajouter une discipline d’endurance appelée Audax. Il s’agit de marches collectives sur de longues distances, de 25 à 200 kilomètres, réalisées à allure régulière, avec une vitesse moyenne autour de 6 km/h et des brevets homologués. Le club vichyssois est l’un des précurseurs dans le Bourbonnais, en organisant des parcours emblématiques comme le Vichy-Bourges sur 150 kilomètres ou le Vichy-Roanne sur 75 kilomètres.
Très vite, Michel se lasse des promenades classiques et veut tester ses limites sur ces épreuves d’endurance. Il démarre par un 25 kilomètres sans difficulté puis enchaîne immédiatement avec un Bourges-Vichy de 150 kilomètres, son premier grand défi de longue distance.
Les premiers pieds surchargés de fatigue, il se rappelle cette étape lointaine où, au dernier ravitaillement à Saint-Pourçain-sur-Sioule, il franchit la ligne en dernier et reçoit des glaçons enveloppés dans un tissu pour soulager ses pieds en feu pendant le repas. Cette thérapie improvisée lui permet d’aborder les 30 kilomètres finaux à une cadence soutenue et efficace.
Cette première expérience marquante déclenche une véritable passion pour les Audax, qui s’enchaîneront chaque week-end pendant de nombreuses années. Michel devient rapidement le « capitaine de route », celui qui mène le groupe et veille à maintenir la vitesse moyenne imposée de 6 km/h, tout en gérant les arrêts prévus en chemin. Son rôle est central: assurer la continuité du groupe et accompagner les marcheurs tout au long des étapes.
Au fil des années, les souvenirs affluent, mêlant joie et douleur, sur des parcours parfois grandioses comme la traversée des châteaux de la Loire avec un ravitaillement à Chambord, l’ascension du Mont Ventoux à l’arrivée d’un 100 kilomètres, ou encore les somptueuses Gorges de l’Ardèche. D’autres moments furent plus durs: les 150 kilomètres Bourges-Guéret sous une pluie incessante qui dura près de 30 heures, ou la canicule de 2003 dans la plaine de la Limagne où les kilomètres semblaient s’allonger sous 38°C.
Pour Michel, abandonner n’a jamais fait partie de l’option, même après quatre Audax de 200 kilomètres, totalisant plus de 40 heures de marche. Il s’est même lancé dans des épreuves en étapes, comme Vichy-Montpellier sur 450 kilomètres étalés sur huit jours, ou Vichy-Rodez et des segments de 50 kilomètres, accompagné de compagnons fidèles issus de l’ASG, Maurice Chérasse et Christophe Pauget.
Au cumul des Audax, les distinctions se succèdent sous forme d’aigles de bronze, d’argent et d’or. Michel totalise douze aigles d’or, pour un voyage qui totalise environ 23 400 kilomètres en Audax, sur un peu plus d’une décennie. En 2002, lors de son dixième Aigle d’or, il reçoit de l’Union des Audax Français le précieux aigle sculpté, symbole de son dévouement, et devient délégué régional de l’organisation.
En 2009, la vie personnelle prend le pas sur les efforts sportifs: la naissance de son petit-fils réoriente ses priorités et Michel décide de raccrocher les baskets. À 75 ans, il n’éprouve plus l’envie de marcher comme autrefois, mais l’engagement et l’esprit d’équipe demeurent gravés dans sa mémoire. Suzanne, son épouse, a joué un rôle clé en assurant l’intendance lors des Audax et veillant à ce que chaque étape bénéficie d’un ravitaillement solide, allant jusqu’à prévoir une paire de baskets de rechange à mi-parcours pour soulager les pieds enflés. Le couple partageait cette passion et a sillonné ensemble les routes de France, dans une camaraderie qui a contribué à écrire une page marquante de la randonnée et de l’endurance.
Paradoxalement, Michel a aussi franchi le tour du Mont Blanc, soit 130 kilomètres en cinq jours. Il avoue que dans ce cadre, la marche “en rando” était plus facile, car l’on pouvait prendre son temps, mais il garde le souvenir d’un seul regret: ne pas avoir pris le temps d’atteindre le sommet du Mont Blanc, le toit de l’Europe à 4 807 mètres, en raison du rythme soutenu des brevets Audax qui ne laissaient guère de répit. La passion, parfois, l’emporte sur les rêves de sommet.
Au final, l’histoire de Michel Pichaud témoigne d’une énergie rare et d’un esprit d’aventure partagé avec ceux qui l’ont accompagné tout au long de ce parcours. Une histoire de marche, d’endurance, d’Audax, et de randonnée qui a tracé une route inspirante à travers les paysages de France et au-delà.
Sa trajectoire montre qu’une passion peut transformer des années de vie en un chemin d’exigence et de plaisir partagé, où chaque pas raconte une histoire de persévérance et de solidarité.
Une page qui rappelle que la marche reste une école de patience, de camaraderie et d’effort, capable d’emporter ceux qui s’y aventurent sur des distances qui dépassent l’imagination, tout en restant accessible à tous ceux qui, comme Michel, savent écouter le rythme de leurs pas.
En mémoire de cette aventure, la marche continue d’inspirer ceux qui aspirent à tester leurs limites, avec le même esprit de découverte et le même plaisir de partager des kilomètres, des paysages et des moments de vie autour d’un autre pas à l’heure.









