La gymnastique rythmique italienne traverse une crise majeure avec le départ de son emblématique entraîneuse, Emanuela Maccarani, après des accusations de maltraitance portées par plusieurs jeunes gymnastes. Ce changement marque un tournant dans la discipline, longtemps dominée par cette figure controversée.
Une page qui se tourne pour les « Farfalle »
Pendant plus de vingt ans, Emanuela Maccarani a dirigé l’équipe nationale italienne de gymnastique rythmique, surnommée les « Farfalle » (les papillons), la propulsant au sommet d’un sport dominé historiquement par les pays de l’ex-bloc soviétique. Toutefois, face à des plaintes répétées pour maltraitance venant de jeunes talents comme Nina Corradini et Anna Basta, la Fédération italienne de gymnastique (FGI) a décidé de se séparer de son entraîneuse le 26 mars.
Le président de la FGI, Andrea Facci, justifie ce licenciement comme une volonté d’ouvrir un nouveau cycle en vue des Jeux Olympiques de Los Angeles 2028. Pour Nina Corradini, vice-championne d’Europe juniors en 2017, cette décision est une étape importante pour les futures générations qui intégreront l’équipe nationale et espèrent vivre une expérience différente.
Un modèle contesté de discipline et de rigueur
Malgré les succès internationaux, le régime imposé par Maccarani au Centre national d’entraînement de Desio, près de Milan, s’est avéré très dur. Les journées d’entraînement commencaient systématiquement par la pesée des gymnastes, devant leurs coéquipières.
Les critiques et insultes envers celles qui prenaient du poids étaient courantes, avec des phrases blessantes telles que « Maigris un peu, tu vas peut-être finir par rentrer dans le cerceau » ou « Tu ressembles à un petit cochon ». Ce climat de pression constante a conduit certaines jeunes athlètes à développer des troubles alimentaires et des pensées suicidaires.
Nina Corradini évoque cette expérience comme une « bulle » où tout semblait normal mais où il n’existait aucune échappatoire.
Enquêtes et révélations accablantes
Le témoignage de Nina Corradini en octobre 2022, relayé par la presse, a mené le parquet de Monza à ouvrir une enquête. Des écoutes téléphoniques réalisées auprès de l’encadrement et de dirigeants ont mis en lumière un climat délétère, avec des propos moqueurs entre entraîneuses et des commentaires sexistes y compris de la part de l’ancien président de la FGI, Gherardo Tecchi.
Un passage particulièrement choquant diffusé dans la presse révèle qu’Olga Tishina, adjointe de Maccarani, dénonçait les méthodes jugées abusives d’une autre entraîneuse, Julieta Cantaluppi, accusée de punir physiquement ses gymnastes.
Cependant, Sofia Raffaeli, médaillée olympique 2024 et entraînée par Cantaluppi, a publiquement défendu cette dernière, réfutant toutes ces accusations.
Un avenir tourné vers la réforme
Alors que la procédure judiciaire contre Emanuela Maccarani pour maltraitance est en cours, les sanctions de la justice sportive ont jusqu’à présent été jugées insuffisantes. Daniela Simonetti, de l’association ChangeTheGame, dénonce un système où « chacun se couvrait » et appelle à une refonte complète de la Fédération.
La FGI affirme sa volonté d’ouvrir un nouveau chapitre pour la gymnastique rythmique italienne. Nina Corradini plaide pour une formation améliorée des entraîneurs, incluant la collaboration avec des psychologues et nutritionnistes, afin de mieux accompagner les jeunes sportives.












