Les droits TV de la Ligue 1 traversent une période délicate: après un début prometteur marqué par un week-end réussi et un regain d’abonnés, la réalité économique revient au galop. L’analyse réalisée à partir du « guide de répartition initial des droits audiovisuels et de l’indemnité de résiliation de DAZN Ligue 1 saison 2025-2026 » met en lumière des retombées financières dramatiquement faibles pour les clubs cette saison, relançant les inquiétudes sur l’avenir du football français.
Le contraste entre enthousiasme et réalité économique
La Ligue 1 avait été saluée pour son élan, avec une ouverture de saison enthousiasmante portée par une lutte au sommet et par des abonnements qui semblaient en hausse. Mais les chiffres publiés par L’Équipe montrent que, même si les premiers signaux avaient de quoi nourrir l’espoir, les revenus nets restant à distribuer restent largement sous tension. Dans ce cadre, les clubs paient un lourd tribut à des coûts et à une répartition qui ne renforcent pas durablement la compétitivité du football français.
Pour illustrer la situation, considérons le cadre général des droits: le total des redevances est estimé à 334,6 millions d’euros, répartis entre DAZN (85 M€), beIN (82,5 M€ pour la Ligue 1 et la Ligue 2), des droits nationaux (France Télévisions et TF1, chacun 1 M€) et les droits internationaux (129,1 M€). À partir de ce total, les clubs de Ligue 1 ne se partagent que 80,5 millions d’euros, tandis que la Ligue 2 n’en reçoit que 11,7 millions. En outre, les charges liées à la Ligue, au syndicat et à LFP Média pèsent lourd (environ 182,6 millions), et il faut ajouter 5,25 millions d’aide aux relégués ainsi que 54 millions versés à CVC, représentant une part significative du deal lié au fonds d’investissement.

Ces chiffres décrivent une réalité où, même en supposant des recettes, la marge disponible pour les clubs est minuscule. En clair, même si la Ligue 1+ est présentée comme la bouée de sauvetage, la distribution immédiate reste insuffisante pour soutenir durablement les budgets et les transferts des clubs.
Ligue 1+, une promesse prudente face à des comptes serrés
Le projet Ligue 1+ est au cœur des débats. Les chiffres avancés par Nicolas de Tavernost et discutés dans la presse évoquent des revenus potentiels importants, mais l’estimation varie selon les sources et les hypothèses, et le point d’interrogation demeure toujours élevé.
Selon Pierre Maes, consultant international en droits TV du sport, « zéro surprise » sur le grand chapitre global, mais une réalité plus préoccupante concernant le montant net après déductions. Il rappelle que le danger réside surtout dans la saison suivante: « on est plus sûr de rien, sauf des droits internationaux et de la Ligue 2 ». Sans un accord prospère ou une augmentation des revenus via Ligue 1+, les clubs pourraient ne toucher qu’un montant modeste la saison prochaine, et ni les revenus DAZN ni ceux de beIN n’apparaîtront comme entrées directes. L’objectif affiché par les dirigeants de Ligue 1+ demeure d’atteindre, sur le long terme, des recettes qui permettent d’amortir ces pertes, mais la marche reste haute et les incertitudes nombreuses.
Le scepticisme est d’autant plus palpable que, selon Maes, même l’objectif initial d’un million d’abonnés pour la première année paraît raisonnable uniquement s’ajoutent les conversions DAZN. L’image de “600 000 abonnés” annoncée peut refléter une partie convertie plutôt que de nouveaux abonnés nets, et le piratage persiste comme une réalité à prendre en compte. Le piratage et les défis de distribution demeurent des obstacles majeurs pour une croissance stable des revenus.
Illustration de la dynamique, les chiffres avancés indiquent une possible mutation des revenus sur une période de deux ans, avec une perspective de plus en plus incertaine quant à l’évolution des paiements et des droits. Le montage de la Ligue 1+ est présenté comme une initiative complexe, où l’objectif initial de recettes pourrait être dépassé par des coûts de production et des parts dues à des partenaires externes, alimentant les débats sur la viabilité économique à moyen terme.

Les droits internationaux: un révélateur des inégalités
Depuis la saison 2022-2023, les droits internationaux ne couvrent plus l’ensemble des clubs à parts égales: environ 122,6 millions sont alloués aux clubs bénéficiant du coefficient UEFA sur les trois dernières années sur un total de 129,1 M€. Cette répartition marque, selon Pierre Maes, l’une des dérives les plus marquantes de la distribution actuelle: « la Ligue française est devenue l’une des plus inégalitaires en Europe, en favorisant les grands clubs ». Avec l’absence de droits domestiques supplémentaires, les droits internationaux prennent rapidement de l’ampleur et creusent les écarts entre les clubs les plus ambitieux et les plus modestes, et ce phénomène pourrait persister tant que la redistribution ne sera pas repensée.
Face à ces inégalités, des pistes de réflexion émergent, comme l’idée de partager une partie des revenus UEFA entre les clubs qui jouent l’Europe, une proposition évoquée dans certains pays, notamment en Belgique. Bien que cela reste du domaine des discussions, l’enjeu est clair: redistribuer pour limiter les écarts et donner à davantage de clubs une base financière plus stable. Pour que la saison 2027-2028 se déroule dans des conditions moins précaires, le football français aurait besoin d’un distributeur prêt à dépasser les rancœurs et d’un club dominant acceptant de réduire légèrement sa part du gâteau.
En définitive, l’espoir demeure que la Ligue 1 puisse trouver un équilibre qui permette au football français de survivre et de se renouveler. L’analyse des droits TV souligne une crise structurelle: plus qu’un simple problème de chiffre, il s’agit d’un enjeu de modèle économique et de solidarité entre clubs, qui conditionnera l’avenir du championnat et, par extension, du football en France.
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