Matthias Ginter : la peur n’est plus là au quotidien

Matthias Ginter : la peur n’est plus là au quotidien

Entretien avec Matthias Ginter sur les attentats du 13 novembre 2015 au Stade de France et les suites, comment il a retrouvé confiance et repris le chemin du football.

France

Matthias Ginter explique que la peur n’est plus présente au quotidien depuis les attentats du 13 novembre 2015 et les événements qui ont suivi. Il revient sur cette soirée au Stade de France où l’équipe nationale allemande préparait un match important face à la France devant 80 000 spectateurs. Cette journée avait commencé sous tension après une alerte à la bombe dans l’hôtel où logeait la Mannschaft. Le soir, le coup d’envoi approche et une première détonation, puis une seconde, retentit; l’une provenait du côté droit où il évoluait. L’explosion résonne très fort et, sur le terrain, le doute s’installe avant que chacun ne se recentre sur le match.

La journée avait démarré sous tension après une alerte à la bombe à l’hôtel où séjournait la Mannschaft. Le soir, le coup d’envoi approche et une détonation, puis une autre, retentit; l’une provenait du côté droit où il évoluait. L’explosion résonne très fort et, sur le terrain, le doute s’installe avant que chacun ne se recentre sur le match.

À la fin du match, les supporters ne célèbrent pas comme d’habitude. En entrant dans les vestiaires, l’équipe apprend qu’il y a eu des attaques autour du stade et en ville. Certains joueurs avaient leur famille sur place, d’autres devaient rentrer chez eux avec davantage d’informations que nous. Le moment est marqué par l’incompréhension et une certaine inquiétude.

Le trajet jusqu’à l’aéroport s’est déroulé dans des rues vides, sans lumière, une image presque irréelle d’une grande capitale comme Paris.

La nuit suivante, les joueurs occupaient les vestiaires, dans la salle de massage, et envoyaient des messages à leurs proches pour obtenir des informations. Certains ont essayé de dormir, mais sans succès.

Pour Ginter, dormir était quasi impossible. Âgé de 21 ans, il a du mal à fermer l’œil après un match tardif et dans un contexte aussi lourd. Il se souvient de ce manque de repos comme d’une cicatrice qui ne se referme pas.

Matthias Ginter portrait
Matthias Ginter évoque ces moments et leurs répercussions.

Des joueurs français et allemands qui se croisaient au Bayern Munich, et notamment certains du Bayern, ont échangé quelques mots avec nous dans les vestiaires. Puis, vers 6 heures du matin, nous avons quitté le stade et rejoint l’aéroport dans une atmosphère irréelle: peu de monde dans les rues, peu de lumière et seul le dispositif de sécurité était présent.

Quelques jours plus tard, de retour en Allemagne, vous deviez affronter les Pays-Bas à Hambourg, mais le match fut annulé en raison d’une nouvelle menace. Personne ne voulait jouer si peu après ce qui s’était passé, mais il a fallu y aller. Avant le départ, on évoquait la possibilité d’une bombe dans le stade.

Comment se remettre d’un rassemblement international aussi éprouvant ? J’ai retrouvé ma famille et mes proches; j’ai cherché à comprendre ce qui s’était passé et j’ai pris le temps de revenir sur les événements pour mieux les appréhender. Le retour à la normale prend du temps et, aujourd’hui encore, certains gestes du quotidien rappellent le danger vécu.

Un an et demi après le 13 novembre, un autre danger survient lorsque le car de Dortmund est pris pour cible avant un match de Ligue des champions contre Monaco: trois bombes explosent à proximité et les vitres se brisent, dans des conditions particulièrement brutales. L’événement survient de manière plus soudaine que Paris et laisse une impression durable.

Dans les deux cas, le football professionnel a été une nécessité plus forte que les émotions. Si les instances estiment qu’un match doit avoir lieu, on prend le terrain, même si on préférerait parfois ne pas le faire. Avant le match contre Monaco, notamment avec Dortmund, beaucoup n’avaient pas envie de jouer, mais l’UEFA a insisté et le match s’est tenu.

Vivre normalement après deux attentats dans un laps de temps aussi court n’est pas une évidence. Le premier épisode paraissait irréel, le second était encore plus difficile à accepter. Avec le temps, on apprend à gérer ces inquiétudes et à accepter que le risque zéro n’existe pas. Le football a aussi servi de thérapie et m’a aidé à avancer, avec le soutien de ma famille et de mes proches.

En 2018, trois ans après le 13 novembre, l’équipe d’Allemagne affrontait la France en Ligue des Nations, ce qui m’a permis de découvrir ce que signifie rejouer dans le Stade de France. Le fait de revenir dans le même hôtel que lors de 2015 était étrange, mais cela a aussi aidé certains anciens à surmonter l’épreuve.

À 23 ans, j’avais envisagé d’arrêter le football pour des raisons de sécurité; j’ai fini par réévaluer cette décision en réalisant que le risque zéro n’existe pas pour tout le monde. J’ai poursuivi ma carrière par plaisir et par nécessité: le sport a été une forme de thérapie après les proches. Aujourd’hui, la peur n’est plus présente au quotidien et monter dans le bus ne m’effraie plus autant.

Cela m’a aussi rappelé l’importance du soutien familial et du travail personnel pour reconstruire une vie après de tels drames. Le football reste pour moi une source de joie et de motivation, même si des souvenirs douloureux peuvent resurgir de temps à autre. Mon expérience montre qu’il est possible de reprendre confiance et d’avancer malgré l’ombre de l’insécurité.

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